De l'hypnose à l'hypnose Ericksonienne

Comment l'hypnose est devenue l'hypnose

De l’hypnose à l’hypnose Ericksonienne : Un Voyage fascinant

Les premiers pas de l’hypnose : De l’antiquité à Mesmer

L’hypnose, bien qu’elle soit pratiquée depuis les temps anciens, notamment en Grèce et en Égypte, a été popularisée par Anton Mesmer. Si ses théories, comme celle du “fluide magnétique” ou encore du “‘magnétisme animal”, ne correspondent pas à la conception actuelle de l’hypnose, il ouvre néanmoins la voie à de nombreuses recherches. Mesmer devient célèbre pour ses pratiques et, face à la demande, il met en place des thérapies collectives, utilisant d’immenses baquets d’eau magnétisée. Ces séances collectives étaient le théâtre de crises magnétiques contagieuses, où les femmes de la haute société parisienne perdaient le contrôle, entre rires hystériques, évanouissements et convulsions…

Baquet de Mesmer (traitements collectifs)
Anton Mesmer (1734-1815)

 

Dans les années 1820, l’abbé Faria, disciple de Mesmer développe une méthode d’hypnose qui ressemble davantage à l’hypnose de spectacle d’aujourd’hui : tout en demandant au sujet de penser au sommeil il lui intime l’ordre de dormir jusqu’à ce que le sommeil hypnotique survienne effectivement. L’abbé Faria abandonne l’idée d’un fluide magnétique. 

En 1845, le chirurgien James Esdaile (1808-1859) utilise l’hypnose  en chirurgie pour pratiquer des opérations sous anesthésie, diminuant drastiquement le taux de mortalité post-opératoire de 50% à 5%. Esdaile, qui a recourt à de multiples techniques, dont notamment le fractionnement, provoque des hypnoses profondes. Si l’expression d’anesthésie magnétique reste toujours employée, le mot « hypnotisme » forgé par Étienne Félix d’Henin de Cuvillers commence à se populariser, notamment, avec le médecin écossais James Braid (1795-1860). Pour Braid, l’hypnose est un phénomène neurologique, et son approche se démarque désormais clairement de celle des magnétiseurs.  James Braid induit l’hypnose en demandant au sujet de se concentrer sur un objet brillant, une montre ou un pendule par exemple jusqu’à ce que les yeux clignes. Braid fait également connaître l’hypnose en France, notamment à Auguste Liébault qui, avec Hyppolite Bernheim, développe l’École de Nancy, faisant de l’hypnose un puissant outil thérapeutique. L’hypnose est maintenant principalement basé sur la suggestion verbales, c’est à dire, les paroles de l’hypnotiseur. Pendant ce temps, à Paris, l’intérêt pour l’hypnose se émerge à l’hôpital avec Jean-Martin Charcot. Charcot, qui est l’un des fondateurs de la neurologie moderne, applique l’hypnose aux patientes atteintes d’hystérie à l’hopital de la Salpêtrière ou il fait d’impressionnantes démonstrations.  Pourtant, un désaccord important émerge bientôt entre l’école de Nancy et celle de la Salpêtrière : l’école de Nancy considère l’hypnose comme un phénomène naturel et accessible à tous, tandis que l’école de la Salpêtrière y voit un état pathologique lié à l’hystérie.

Jean Martin Charcot. Démonstration d'hypnose
aux étudiants de médecine de l'hôpital de
la Salpétrière

 

L’hypnose et l’arrivée de la psychanalyse

Sigmund Freud, qui étudie l’hystérie, est d’abord fasciné par l’hypnose. Il se forme auprès de Charcot mais également auprès de Liébault et Bernheim. En 1895, il publie Études sur l’Hystérie – un livre largement consacré aux résultats thérapeutiques obtenus avec l’hypnose sur des patientes atteintes d’hystérie. Malgré tout, Freud abandonne progressivement la pratique de l’hypnose notamment en raison des difficultés liées au contrôle des phénomènes de transfert et à la dimension mystique qui entourait encore l’hypnose. Ainsi, l’hypnose sombre dans l’oubli pendant de longues années, jusqu’à ce qu’un homme, Milton H. Erickson, redonne à cette discipline ses lettres de noblesse.

Sigmund Freud (1856 - 1939) Fondateur de la psychalanyse
L'hypnose aux prémisses de la psychalanyse

 

L’Hypnose Ericksonienne : Une révolution dans la pratique

Milton Hyland Erickson, un psychiatre et psychologue américain, est sans doute l’une des figures les plus influentes de l’histoire de l’hypnose moderne. Né dans l’État rural du Wisconsin, il traverse une enfance marquée par des difficultés majeures, notamment la poliomyélite qui le laisse partiellement paralysé. Cette épreuve forge son génie de l’observation et sa capacité à comprendre les mécanismes de guérison du corps et de l’esprit.

Erickson découvre réellement l’hypnose en 1924 grâce à sa rencontre avec L. Clark Hull, un psychologue pionnier dans le domaine. Cependant, un malentendu avec son mentor entraîne une rupture qui empêche Erickson de pratiquer l’hypnose de manière conventionnelle. Cet isolement forcé est finalement bénéfique pour sa pratique, car il affine une méthode unique : hypnotiser sans hypnose apparente, c’est-à-dire induire une transe sans recours à des techniques classiques.

Au cours de sa carrière, Erickson devient une légende de la psychothérapie. Travaillant principalement dans son cabinet de Phoenix, il révolutionne le traitement de troubles variés tels que les phobies, les addictions, les troubles sexuels et les dépressions, en utilisant des techniques d’hypnose indirecte et des métaphores. Ses résultats spectaculaires suscitent l’admiration de ses patients et de ses élèves. Jay Halley, l’un de ses disciples, témoigne de la transformation incroyable qu’il a vécue sous la guidance de son maître.

Milton Hyland Erickson (1901-1980)

 

Erickson : Un maître de l’art thérapeutique

Erickson est souvent décrit comme un magicien de la thérapie. Il parvient à résoudre des problèmes en apparence insolubles, en utilisant des approches inédites et parfois déconcertantes : demander à un patient d’agir de manière apparemment absurde, comme s’arrêter toutes les cinq minutes en voiture pour s’allonger dans l’herbe afin de traiter une phobie, ou encourager un autre à rester malade pour l’aider à se guérir.

À la fin de sa vie, une nouvelle crise de poliomyélite l’oblige à se déplacer en chaise roulante, mais son génie thérapeutique ne faiblit pas. Erickson meurt en 1980, peu avant le premier congrès international d’hypnose Ericksonienne. Il laisse un héritage considérable, ayant inspiré des approches comme la PNL (Programmation Neuro-Linguistique), la thérapie paradoxale de Paul Watzlawick et la théorie du double lien de Gregory Bateson.

 

La théorie et la méthode de l’Hypnose Ericksonienne

Erickson ne s’est jamais préoccupé de créer une théorie formelle de l’hypnose ou de la personnalité. Son approche est avant tout pratique et centrée sur le client. Pour lui, l’hypnose est un outil permettant d’aider les patients à retrouver en eux les ressources nécessaires pour résoudre leurs problèmes. Il croyait que les symptômes manifestaient des conflits intérieurs et que, pour guérir, il fallait résoudre ces conflits plutôt que de simplement supprimer les symptômes. C’est en contournant les résistances du client que le changement pouvait s’opérer en douceur, avec confort et aisance.

La méthode Ericksonienne repose sur une forme de communication subtile, loin de l’hypnose autoritaire classique. Erickson utilise des techniques indirectes telles que les métaphores, le saupoudrage d’idées et la confusion, afin d’induire un état de transe légère. L’hypnose, selon lui, n’est pas un état de sommeil mais un état particulier de conscience où l’esprit conscient et l’inconscient interagissent. Il permet au patient d’entrer spontanément dans la transe nécessaire pour guérir, simplement en orientant son attention vers un détail, comme par exemple, en demandant à un patient : « Laquelle de vos mains est la plus lourde en ce moment ? ». Et voilà tout l’art d’Erickson : impossible de répondre à une telle question sans déjà amorcer un début de transe ! 

 

Quelques concepts clés de l’Hypnose Ericksonienne

  1. L’inconscient est une ressource : L’hypnose ericksonienne considère que l’inconscient est un réservoir de ressources, de connaissances et d’expériences. Il peut être un allié précieux pour résoudre des problèmes, surmonter des difficultés et atteindre des objectifs.
  2. La communication indirecte : L’hypnose ericksonienne utilise des suggestions indirectes, des métaphores et des histoires pour communiquer avec l’inconscient. Cela permet de contourner les résistances du conscient et d’induire des changements en douceur.
  3. L’adaptation à la personne : Chaque personne est unique, avec son histoire, ses expériences et ses besoins. L’hypnose ericksonienne s’adapte à chaque individu, en utilisant des techniques et des suggestions personnalisées.
  4. La collaboration : L’hypnose ericksonienne est une approche collaborative et permissive, où le thérapeute et le patient travaillent ensemble. Le thérapeute guide le patient, mais celui-ci reste acteur de son propre changement. Le thérapeute autorise le changement plutôt que de l’imposer.   
  5. L’autonomie : L’hypnose ericksonienne vise à rendre le patient autonome et capable d’utiliser ses propres ressources pour résoudre ses problèmes. Le thérapeute est un guide, mais le patient est responsable de son propre changement.

Conclusion : Erickson, un précurseur de l’Hypnose Moderne

L’hypnose Ericksonienne a profondément changé la manière dont l’hypnose est pratiquée et comprise. À travers une approche respectueuse et subtile, Erickson a su transformer l’hypnose en un puissant outil thérapeutique, éloigné des pratiques autoritaires et mystiques d’autrefois. Son héritage continue d’influencer de nombreuses approches thérapeutiques modernes, et il reste l’une des figures les plus admirées dans le domaine du développement personnel et de la psychothérapie.

Pour aller plus loin dans la découverte de l’hypnose Ericksonienne et de ses principes, le livre « Milton H. Erickson, Un thérapeute hors du commun » de Jay Halley est un incontournable pour comprendre l’essence de cette méthode révolutionnaire.

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